Le 24 novembre 2015, nous avions publié un florilège des turlupinades légales successives affectant les toutes petites entreprises, détournant le chef d’entreprise en société de son métier pour se consacrer à remplir un document administratif ; en voici un nouvel exemple : au nom du beau principe de la lutte contre le blanchiment d’argent (directive européenne 2015/849 du 20 mai 2015) un décret du 12 juin 2017 impose la production d’un document déposé au greffe du tribunal de commerce déclarant « le bénéficiaire effectif » de la société concernée ; bien entendu le dépôt est payant, et la mesure a pris effet au 1er août 2017 pour les nouvelles sociétés.
On appréciera la précipitation et la méconnaissance de ceux qui produisent de telles normes à l’égard des toutes petites sociétés par le simple fait qu’aucune définition du « bénéficiaire effectif » n’est donnée par le décret d’application du 12 juin 2017 ; il semble qu’il faille attendre un autre décret d’application : bref une course mystère dans un labyrinthe légal, organisée par le pouvoir exécutif lui-même, qui impose une obligation (sanctionnée pénalement !) mais sans en donner les conditions, obligeant les juristes eux-mêmes à procéder par supputations.
Bien entendu personne n’a entendu parler de cette nouvelle turlupinade, puisque les sociétés cotées en sont exemptées ; quel média s’intéresse-t-il à la boulangerie ou le plombier du coin en société ?
Qui avait dit «j’aime l’entreprise » ?